Pourquoi il devient de plus en plus difficile de recruter

 

Delphine Roset, fondatrice du cabinet Osalys

 

Une embauche réussie implique que le recruteur et le candidat soient sur la même longueur d’ondes. Delphine Roset, fondatrice du cabinet Osalys, livre son analyse à l’attention des managers afin qu’ils adoptent de nouvelles méthodes pour optimiser leurs process de recrutement et être ainsi dans une meilleure posture d’écoute lors du face-à-face avec le postulant.

 

J’écris quelques lignes, aujourd’hui, sur mon retour d’expérience après plus de dix ans de recrutement, notamment dans le monde du conseil. Malgré le dynamisme technologique et économique de ce secteur, force est de constater qu’il devient de plus en plus difficile de recruter. À qui la faute ? Peu importe. Que je vous parle de mon expérience en tant que DRH ou que je fasse référence à mon expérience en cabinet de recrutement, les constats sont les mêmes, tant du point de vue des candidats que des entreprises qui recrutent.



 

 

Le candidat n’interagit pas avec le recruteur

Quelques illustrations pour comprendre le cercle vicieux dans lequel le secteur IT est plongé.

 

Je suis candidat :

 


- De fonction technique ou commerciale, je mets mon CV en ligne. Après dix minutes, je reçois quatorze appels de sociétés concurrentes avec toutes le même discours : “J’ai vu votre CV, nous avons des projets pour vous, venez nous voir”.


- En entretien. Dix personnes dans la même salle d’attente et une impression d’être un numéro.


- Quelle que soit l’entreprise, on me tient le même discours.


- Le recruteur découvre mon CV pendant l’entretien.


- Les questions sont plates…franchement, le CV aurait suffi.

 


 

 

Je suis recruteur : 


 

- Malgré des messages, les candidats ne me rappellent jamais.


- Je planifie des entretiens auxquels les candidats ne viennent pas sans prévenir.


- Le candidat arrive en entretien et n’a pas son CV.


- Le candidat démarre l’entretien en disant “J’ai une demi-heure seulement à vous accorder.”


- Le candidat n’a pas de question et n’interagit pas avec le recruteur…


- Je survends le poste proposé et ne suis pas objectif dans mes critères d’appréciation.


- Je n’ai pas assez défini les critères d’appréciation et leur évaluation.

 

 

La même grille de lecture

Voici quelques exemples qui illustrent l’incompréhension et l’irrespect réciproques vécus dans le secteur IT. Je ne jette la pierre ni à l’un, ni à l’autre… Comment oserais-je ? En revanche, je veux montrer que l’on peut procéder différemment et, qu’en qualité de recruteurs, nous devons mettre en place de nouvelles pratiques et méthodes, afin de redorer notre blason à l’égard des candidats, d’être davantage à leur écoute et de contribuer au développement du bien-être au travail. 
Donnons l’exemple, soyons irréprochables et le reste suivra. Les mentalités évolueront, les pratiques aussi. Considérons l’individu dans sa globalité et l’entreprise dans l’ensemble de ses dimensions en adaptant l’approche des niveaux logiques de Robert Dilts - très efficaces :


- Environnement. Dans quel contexte ai-je envie de travailler ? Où et Quand ?


- Comportement. Qu’est-ce que je me vois, entends, sens faire ? Quoi ?


- Capacités. Comment accomplir une mission? Quels sont mes ressources ?  Comment ?


- Croyances et valeurs. Quelles valeurs et/ou motivations ce projet nourrit-il ? Qu’est ce qui est important pour moi ? Qu’est-ce que ça m’apporte de faire cela ? Pourquoi ?


- Identité. Qui suis-je quand je fais cela ? Qui ?


- Perspectives. Quel sens est-ce que je donne à ce projet ?
 Entreprise ou candidat, que nous commencions par la première ou la dernière question, ce qui compte c’est l’alignement au travers de cette grille de lecture.

 

 

 

Changer de posture, changer de philosophie

Construisons de nouvelles méthodologies de recrutement autour des questions lorsque nous avons un candidat en face de nous ou lorsque nous définissons un poste ou une fonction.
 Un projet professionnel d’un candidat, réaliste et réalisable, repose sur trois piliers indissociables : compétences, motivations et sens. Sans vision et projection, la motivation s’affaiblit. Et, sans cela, on ne cherche pas à développer ses compétences…. Aujourd’hui, au-delà des compétences d’un candidat ou de ses motivations, notre valeur ajoutée est de déterminer le sens qu’il donne à son projet professionnel. 
Outre les questions classiques et usuelles que nous utilisons, n’y aurait-il pas d’autres pratiques de recrutement comme des outils de développement personnel ?



 

 

D’autres exemples :


- La process communication* pour mieux cerner les leviers de motivations, les perceptions et les comportements sous stress d’un candidat. Ce modèle permet aussi d’obtenir des indications sur le type d’environnement préféré du candidat, le style de management qui lui convient et s’assurer que nous sommes en phase avec le contexte de l’entreprise.


- Utiliser, en toute précaution, des outils de développement personnels qui font appel à une autre partie de nous, comme notre créativité ou notre intuition.


- L’intelligence émotionnelle regroupe un certain nombre de compétences clés complémentaires au QI. Mesurer le quotient émotionnel ne devrait-il pas être plus encouragée dans les pratiques de recrutement ?


- Avoir une posture basse lors des entretiens pour créer le lien avec le candidat.


- Co-construire avec l’entreprise cliente des compétences techniques et comportementales ciblée et élaborer et animer un assessment center sur des critères factuels et observables : “De quoi parle-t-on ?“


- Proposer une offre de coaching d’intégration par des coachs certifiés, pour garantir la meilleure intégration possible.

 

 

Avoir une posture d’écoute

Les idées ne manquent pas. Veillons simplement à rester dans le respect des bonnes pratiques du métier de recruteur. De mon point de vue, la clé de la réussite des recrutements de demain est de réinventer certaines pratiques et de considérer l’individu et l’entreprise dans toutes ses dimensions. Beaucoup de choses sont à réinventer. Les précautions sont de maintenir, en permanence, un environnement de bienveillance, de non-jugement de valeur, en adoptant une posture neutre, d’écoute, de reformulation et de compréhension.
 Finie la survente des postes, finis les CV enjolivés…Candidats et recruteurs, rencontrons nous sur les chemins de vos projets et dans l’alignement de vos visions.

*La process communication est un outil de découverte et de compréhension de sa propre personnalité développée par le psychologue Tabi Kahler. Utilisé en entreprise, il permet de développer une communication efficace.

 

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